Ce 20eme anniversaire sera surtout l’occasion d’explorer les pistes de réforme de l’IDH. Les tableaux de bord statistiques des rapports sur le développement humain devraient être réformés afin de traiter des questions plus larges touchant des dimensions clés du développement humain comme la durabilité, l’égalité et l’autonomisation.
Le PNUD entend semble-t-il tirer les conclusions des débats qui ont interrogé la pertinence de sa marque de fabrique, l’IDH, et de son corollaire, le classement des pays.
La réflexion se mène également au niveau de la Commission statistique de l’ONU, (rattachée au Conseil économique et social), organisme le plus légitime en la matière. C’est en son sein qu’a été adoptée en 1994 la déclaration portant sur les Principes fondamentaux de la statistique officielle, qui codifie les bonnes pratiques en la matière.
La 41ème Commission de la statistique s’est déroulée du 23 au 26 février 2010 à New-York, non sans heurts, illustrant les divergences qui peuvent exister entre les divers acteurs de la statistique mondiale. Les travaux de la Commission ont en effet été caractérisés par un vif débat autour de la réforme de l’indice de développement humain. Dans une déclaration, le Groupe des 77 plus la Chine a exprimé sa préoccupation vis-à-vis de la manière dont la réforme de l’indice est menée par le PNUD. Il a exhorté ce dernier à entamer des consultations avec la Commission, seul organe des Nations Unies habilité à se prononcer en matière de données et de méthodologies statistiques. Abondant dans ce sens, la Commission a exprimé son regret du manque de transparence dans le processus de la réforme. La Commission de la Statistique a en outre mandaté son bureau et un groupe de pays, dont le Maroc, pour examiner l’opportunité et les modalités d’évaluation des réformes de l’IDH.
- l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE)
L’OCDE est une enceinte de réflexion d’importance, qui vise par ses travaux à aller au-delà du PIB, critère clairement limité, pour mesurer le bien-être social, la qualité de vie et le progrès. Par la Déclaration d’Istanbul de 2007 sur la mesure et l’encouragement du progrès dans les sociétés, l’OCDE propose de s’acheminer vers un système de mesure véritablement axé sur le bien-être des individus et sur la manière dont ce bien-être change au cours du temps. Les travaux les plus récents de l’OCDE portent sur les inégalités de revenu et de richesse et le développement de méthodologies pour mesurer plusieurs aspects de la qualité de vie comme l’état de santé, la confiance, la vulnérabilité. L’OCDE a de plus lancé en 2007 un partenariat appelé « Projet global », groupe de réflexion pionnier sur les statistiques.
- PARIS 21
PARIS 21 est un partenariat international promouvant l’utilisation de statistiques rigoureuses comme élément essentiel d’une bonne gouvernance et comme instrument de mesure indispensable de satisfaction des OMD en 2015. Dans la Déclaration de Dakar de novembre 2009, PARIS 21 soulignait les grands progrès restant à accomplir. Concrètement, et dans l’optique des OMD, PARIS 21 assiste les pays en voie de développement dans leur élaboration d’une stratégie de développement d’une statistique nationale rigoureuse.
- La Commission Stiglitz
Installée en février 2008 par le président de la république française, la Commission Stiglitz a rendu son rapport en septembre 2009. La Commission préconise de revoir de fond en comble les modes de calcul de la croissance même s’il ne s'agit pas à proprement parler d'une révolution. Tous les indicateurs mis en avant par la commission existent déjà, qu'il s'agisse par exemple de la mesure de la santé des individus, de leurs habitudes de consommation, de leurs revenus, de leur patrimoine ou encore de leur consommation de loisirs. Mais la méthode est à refonder. Par exemple, cela est maintenant connu, l'accent est mis sur le calcul du PIB, alors que l'analyse du produit national net - qui prend en compte la dépréciation des moyens de production - ou le revenu net des ménages serait plus pertinente.
-La Rencontre internationale de Rabat sur le développement humain (15-16 janvier 2010)
Les recommandations du rapport Stiglitz ont le mérite d’ouvrir un agenda ambitieux et médiatisé pour la réforme des indicateurs de développement humain. C’est dans le droit fil des travaux de la Commission Stiglitz que s’est tenue en janvier 2010 à Rabat une rencontre internationale sur le développement humain, au cours de laquelle les principaux intervenants ont appelé de leurs vœux une réforme de l’IDH. Ainsi, Paul Schreyer, directeur de la statistique à l’OCDE, a pu déclarer à Rabat que « la complexité d’une mesure du progrès humain dans ses diverses dimensions et les disparités caractérisant les systèmes statistiques des différents pays militent en faveur d’une comparaison internationale entre pays qui ont des outils statistiques de même niveau ». En écho, commentant la 130ème place du Maroc au classement selon l’IDH, Ronald Jansen, de la division des statistiques des Nations-Unies a pu déclarer que « les progrès réalisés par le Maroc ne sont pas reflétés par l’IDH, ce qui appelle à repenser les indicateurs à la base de cet indice ».Cette réforme est aujourd’hui, on le voit, au cœur des réflexions, frappantes de convergence, de toutes les institutions internationales concernées.
- Les pistes de réforme de la mesure du développement humain
Les individus doivent en tout état de cause être mis au centre de toute analyse. La notion de qualité de vie devient centrale. Le développement humain dans un pays donné doit inclure certaines dimensions liées aux conditions de vie de la population telles que la pauvreté, l’accès à l’eau, à l’électricité et à la route, la jouissance des droits humains, économiques, sociaux et politiques, les libertés publiques, l’égalité homme / femme et tenir compte des priorités et des spécificités des populations locales. L’IDH, bien trop partiel, doit être repensé pour exprimer toutes ces dimensions de la dynamique du développement humain.
Les statistiques à la base d’un indice de développement humain doivent ensuite mieux valoriser le montant des transferts en nature de l'État vers les ménages. Les dépenses de santé, d'éducation ou de sécurité, par exemple, sont comptabilisées en fonction de leur coût d'entrée, c'est-à-dire le nombre de médecins, de professeurs ou de policiers. Mais le bien-être et le développement qu'elles procurent sont trop rarement pris en compte. Le faire permettrait de calculer différemment la croissance des pays les uns par rapport aux autres, favorisant ceux où la dépense publique est la plus efficace, donc la plus productive. L’institut de statistique français, l’Insee, propose de davantage prendre en compte les indicateurs de revenu et de consommation des ménages au détriment du PIB.
La question du développement durable doit être repensée. Une jungle d’indicateurs existe par exemple pour tenter de mesurer l'impact sur l'environnement de la croissance. La Commission Stiglitz, pour ne pas la nommer, estime urgent de revenir à des critères explicites : le développement durable est celui qui laisse davantage aux générations futures qu'aux générations présentes.
Les débats sur le développement humain ne doivent pas être accaparés par la refonte médiatique de l’IDH. La priorité aujourd’hui pour nombre de pays est d’atteindre les OMD. Les sept premiers objectifs (le huitième concerne les pays développés) font d’ailleurs l’objet d’un rare consensus des pays en voie de développement puisqu’ils mettent l’accent sur un processus dynamique et comparatif de développement qui fait fi du passé historico-économique d’un pays et de la dotation initiale en facteurs de production. L’évaluation finale qui sera faite en 2015 des progrès réalisés par chaque pays au regard de ces OMD sera beaucoup plus parlante que le classement des pays réalisé chaque année par le PNUD sur la seule base d’un critère aussi sujet à caution que l’IDH.
Le PNUD entend semble-t-il tirer les conclusions des débats qui ont interrogé la pertinence de sa marque de fabrique, l’IDH, et de son corollaire, le classement des pays.
La réflexion se mène également au niveau de la Commission statistique de l’ONU, (rattachée au Conseil économique et social), organisme le plus légitime en la matière. C’est en son sein qu’a été adoptée en 1994 la déclaration portant sur les Principes fondamentaux de la statistique officielle, qui codifie les bonnes pratiques en la matière.
La 41ème Commission de la statistique s’est déroulée du 23 au 26 février 2010 à New-York, non sans heurts, illustrant les divergences qui peuvent exister entre les divers acteurs de la statistique mondiale. Les travaux de la Commission ont en effet été caractérisés par un vif débat autour de la réforme de l’indice de développement humain. Dans une déclaration, le Groupe des 77 plus la Chine a exprimé sa préoccupation vis-à-vis de la manière dont la réforme de l’indice est menée par le PNUD. Il a exhorté ce dernier à entamer des consultations avec la Commission, seul organe des Nations Unies habilité à se prononcer en matière de données et de méthodologies statistiques. Abondant dans ce sens, la Commission a exprimé son regret du manque de transparence dans le processus de la réforme. La Commission de la Statistique a en outre mandaté son bureau et un groupe de pays, dont le Maroc, pour examiner l’opportunité et les modalités d’évaluation des réformes de l’IDH.
- l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE)
L’OCDE est une enceinte de réflexion d’importance, qui vise par ses travaux à aller au-delà du PIB, critère clairement limité, pour mesurer le bien-être social, la qualité de vie et le progrès. Par la Déclaration d’Istanbul de 2007 sur la mesure et l’encouragement du progrès dans les sociétés, l’OCDE propose de s’acheminer vers un système de mesure véritablement axé sur le bien-être des individus et sur la manière dont ce bien-être change au cours du temps. Les travaux les plus récents de l’OCDE portent sur les inégalités de revenu et de richesse et le développement de méthodologies pour mesurer plusieurs aspects de la qualité de vie comme l’état de santé, la confiance, la vulnérabilité. L’OCDE a de plus lancé en 2007 un partenariat appelé « Projet global », groupe de réflexion pionnier sur les statistiques.
- PARIS 21
PARIS 21 est un partenariat international promouvant l’utilisation de statistiques rigoureuses comme élément essentiel d’une bonne gouvernance et comme instrument de mesure indispensable de satisfaction des OMD en 2015. Dans la Déclaration de Dakar de novembre 2009, PARIS 21 soulignait les grands progrès restant à accomplir. Concrètement, et dans l’optique des OMD, PARIS 21 assiste les pays en voie de développement dans leur élaboration d’une stratégie de développement d’une statistique nationale rigoureuse.
- La Commission Stiglitz
Installée en février 2008 par le président de la république française, la Commission Stiglitz a rendu son rapport en septembre 2009. La Commission préconise de revoir de fond en comble les modes de calcul de la croissance même s’il ne s'agit pas à proprement parler d'une révolution. Tous les indicateurs mis en avant par la commission existent déjà, qu'il s'agisse par exemple de la mesure de la santé des individus, de leurs habitudes de consommation, de leurs revenus, de leur patrimoine ou encore de leur consommation de loisirs. Mais la méthode est à refonder. Par exemple, cela est maintenant connu, l'accent est mis sur le calcul du PIB, alors que l'analyse du produit national net - qui prend en compte la dépréciation des moyens de production - ou le revenu net des ménages serait plus pertinente.
-La Rencontre internationale de Rabat sur le développement humain (15-16 janvier 2010)
Les recommandations du rapport Stiglitz ont le mérite d’ouvrir un agenda ambitieux et médiatisé pour la réforme des indicateurs de développement humain. C’est dans le droit fil des travaux de la Commission Stiglitz que s’est tenue en janvier 2010 à Rabat une rencontre internationale sur le développement humain, au cours de laquelle les principaux intervenants ont appelé de leurs vœux une réforme de l’IDH. Ainsi, Paul Schreyer, directeur de la statistique à l’OCDE, a pu déclarer à Rabat que « la complexité d’une mesure du progrès humain dans ses diverses dimensions et les disparités caractérisant les systèmes statistiques des différents pays militent en faveur d’une comparaison internationale entre pays qui ont des outils statistiques de même niveau ». En écho, commentant la 130ème place du Maroc au classement selon l’IDH, Ronald Jansen, de la division des statistiques des Nations-Unies a pu déclarer que « les progrès réalisés par le Maroc ne sont pas reflétés par l’IDH, ce qui appelle à repenser les indicateurs à la base de cet indice ».Cette réforme est aujourd’hui, on le voit, au cœur des réflexions, frappantes de convergence, de toutes les institutions internationales concernées.
- Les pistes de réforme de la mesure du développement humain
Les individus doivent en tout état de cause être mis au centre de toute analyse. La notion de qualité de vie devient centrale. Le développement humain dans un pays donné doit inclure certaines dimensions liées aux conditions de vie de la population telles que la pauvreté, l’accès à l’eau, à l’électricité et à la route, la jouissance des droits humains, économiques, sociaux et politiques, les libertés publiques, l’égalité homme / femme et tenir compte des priorités et des spécificités des populations locales. L’IDH, bien trop partiel, doit être repensé pour exprimer toutes ces dimensions de la dynamique du développement humain.
Les statistiques à la base d’un indice de développement humain doivent ensuite mieux valoriser le montant des transferts en nature de l'État vers les ménages. Les dépenses de santé, d'éducation ou de sécurité, par exemple, sont comptabilisées en fonction de leur coût d'entrée, c'est-à-dire le nombre de médecins, de professeurs ou de policiers. Mais le bien-être et le développement qu'elles procurent sont trop rarement pris en compte. Le faire permettrait de calculer différemment la croissance des pays les uns par rapport aux autres, favorisant ceux où la dépense publique est la plus efficace, donc la plus productive. L’institut de statistique français, l’Insee, propose de davantage prendre en compte les indicateurs de revenu et de consommation des ménages au détriment du PIB.
La question du développement durable doit être repensée. Une jungle d’indicateurs existe par exemple pour tenter de mesurer l'impact sur l'environnement de la croissance. La Commission Stiglitz, pour ne pas la nommer, estime urgent de revenir à des critères explicites : le développement durable est celui qui laisse davantage aux générations futures qu'aux générations présentes.
Les débats sur le développement humain ne doivent pas être accaparés par la refonte médiatique de l’IDH. La priorité aujourd’hui pour nombre de pays est d’atteindre les OMD. Les sept premiers objectifs (le huitième concerne les pays développés) font d’ailleurs l’objet d’un rare consensus des pays en voie de développement puisqu’ils mettent l’accent sur un processus dynamique et comparatif de développement qui fait fi du passé historico-économique d’un pays et de la dotation initiale en facteurs de production. L’évaluation finale qui sera faite en 2015 des progrès réalisés par chaque pays au regard de ces OMD sera beaucoup plus parlante que le classement des pays réalisé chaque année par le PNUD sur la seule base d’un critère aussi sujet à caution que l’IDH.