Une approche multidimensionnelle : Pauvreté et inégalités des conditions de vie au Maroc entre 2001 et 2007

Rédigé le Jeudi 9 Septembre 2010 à 15:29 | Lu 3102 fois


L’analyse de la pauvreté au Maroc a fait l’objet de plusieurs études, Banque Mondiale (1993, 2000), Haut Commissariat au Plan (2001, 2006), etc. Ces études ont pu décrire les caractéristiques des populations pauvres et analyser les différents types de comportement des ménages et évaluer leur impact sur le bien être. Et face aux besoins récurrents de formulation de stratégies locales de réduction de la pauvreté, le Maroc, en collaboration avec la Banque mondiale, a élaboré trois cartes de pauvreté (1994, 2004 et 2007) qui consistent à avoir des indicateurs de pauvreté et d’inégalités à des niveaux géographiques, les plus fins, à savoir la commune et voire même le quartier. Ces cartes ont permis, ente autres, aux décideurs et aux hommes politiques de bien cibler leurs stratégies d’intervention.


Cependant, tous ces travaux se sont basés sur une approche unidimensionnelle (monétaire) d’analyse de la pauvreté utilisant le revenu (dépense) comme le seul indicateur du bien être. Cette approche ne fait pas l’unanimité parmi les économistes comme étant le seul cadre d’analyse de la pauvreté. En effet, un consensus s’est dégagé, depuis quelques années prouvant que la pauvreté est un phénomène multidimensionnel. Certains indicateurs sociaux apportent une information qui n’est pas reflétée par l’approche monétaire d’évaluation de la pauvreté. La faiblesse du niveau de vie n’est pas le seul facteur dont dépend la pauvreté individuelle. En effet, le bien-être individuel est intimement lié à la capacité qu’a l’individu de subvenir à certains besoins fondamentaux (logement décent, nourriture, scolarisation, etc.). Le revenu peut être considéré, donc comme un moyen parmi d’autres pour se procurer un niveau de vie requis.

Selon l’économiste Amartya SEN, la pauvreté est avant tout une privation des capacités élémentaires même si « cette définition ne vise en aucune manière à nier l’évidence : un revenu faible constitue bien une des causes essentielles de la pauvreté, pour la raison, au moins que l’absence des ressources est la principale source de privation d’un individu ». (SEN, 2000).

Il est donc nécessaire d’adopter une approche complémentaire à l’approche monétaire pour la construction d’un indicateur du bien-être individuel permettant d’étudier la pauvreté. L’idée sous-jacente à cette approche non monétaire est que certains attributs non monétaires, tels que le statut matrimonial d’un individu, ses conditions de logement, l’environnement sanitaire dans lequel il vit, etc., peuvent être considérés comme des indicateurs du bien-être. La construction d’un indice composite du bien-être basé sur ces indicateurs offre une alternative fiable à l’indicateur monétaire du bien-être et s’inscrit dans le cadre général de l’analyse multidimensionnelle de la pauvreté.

L’élargissement de la définition de la pauvreté, jusque là utilisée par toutes les études sur la pauvreté au Maroc, permettra d’enrichir la panoplie de mesures envisageables pour le ciblage et le suivi de sa réduction. Deux raisons motivent ce travail. La première consiste en l’adoption d’une nouvelle manière de définir et de mesurer la pauvreté, en se fondant sur une approche multidimensionnelle utilisant les facteurs intrinsèques et non monétaires de la pauvreté. La seconde raison est de se référer à cette approche de la pauvreté pour identifier les politiques et les stratégies qui permettent de la réduire. En fait, les objectifs fondamentaux de ce travail consistent à : i) identifier et décrire les principales facettes de la pauvreté des conditions de vie des ménages au Maroc, ii) en déduire un profil de pauvreté et d’inégalités et, enfin, iii) tester la concordance entre mesures des conditions de vie et de bien-être monétaire............

Article de Monsieur EZZRARI Abdeljaouad (HCP) à Télécharger